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Silence ! … et après ?
Lorsque se taisent le crépitement des kalachnikovs et le bruit assourdissant des explosions, faute d’hurler sa colère contre la barbarie, on reste sans voix.
Le silence s’impose. Comme respect de la douleur. Un recueillement sur des morts inopinées, absurdes.
Face à d’incorrigibles impatiences médiatiques, qu’amplifient bientôt de légitimes curiosités populaires, comment communiquer avec sobriété ?
L’exemple donné par le ministre de l’Intérieur, d’une expression à la fois retenue, précise, détaillée et qui s’est imposée… En situation de crise.
Pourquoi ne pas souhaiter entendre toujours un tel registre de communication politique ? Pour humblement souscrire à l’obligation constitutionnelle de rendre compte.
Et pas seulement par la voix d’un ministre, d’un Premier ministre ou d’un Président de la République, mais à l’instar du Procureur de la République de Paris, à tous les niveaux de la responsabilité politique ou de la fonction publique.
Dire les choses sereinement et dans toute leur complexité, sans céder aux sirènes d’une com’ simpliste et spectaculaire, pour être médiatique.
Savoir dire aussi les choses qui doivent être tues : mettre en avant les raisons d’intérêt général du non-dit.
Bref, une pédagogie qui ne doit pas rester univoque. Une communication qui ouvre sur un débat public. Un dialogue d’autant plus calme que les enjeux sont majeurs et qu’est essentielle l’honnêteté de l’information et celle des convictions.
C’est cette clé, de l’authenticité dans une relation empathique des gouvernants avec les gens, qui ouvre la voie vers une autre communication politique. Essentiel pour faire face aux usages de la com’, qui profitent avant tout aux menteurs, aux manipulateurs, aux extrémistes, aux fondamentalistes, aux terroristes…
Essentiel pour rétablir la confiance.
Décidément, c’est dans la douleur que nous apprenons que la démocratie a besoin pour mieux se défendre d’une autre communication.
Les citoyens attendent d’être, peu ou prou, associés à la définition de l’offre politique.
La représentation du peuple ne peut retrouver sa complète légitimité que dans le dialogue et la concertation.
La leçon de Tsipras
Les raisons des succès d’Alexis Tsipras semblent échapper, tant à la classe politique, qu’aux médias.
C’est qu’il use peu des recettes habituelles de la com’ (discours dissocié des actes, promotion publicitaire et langue de bois, mensonges et manipulations). Il fait appel à des modes de communication connus des citoyens (consultations électorales, référendum) d’une démocratie en général peu participative.
Il choisit le registre de la délibération collective – chère à Mendés France – même si la participation s’érode, mais suscite en réalité plus de mobilisation que de fronde.
Il établit ainsi avec le peuple une certaine relation de confiance, sans démagogie et qui lui permet de dire sa vérité en temps réel. En dépit d’une énergie farouche déployée à se confronter aux instances européennes, il a dû admettre, pour maintenir la Grèce dans l’Union Européenne, des évolutions incontournables qui l’ont éloigné de ses premières promesses, intenables.
Sur ses inflexions, réalistes ou radicales, il a interrogé le plus fréquemment possible les opinions, autrement que par d’inutiles sondages n’impliquant pas l’ensemble de la population,.
Dans sa communication, il a donc privilégié la qualité de la relation avec les citoyens. Et alors, les messages ont été reçus et en fait assez bien compris.
Une leçon à méditer pour les démocraties dont des fondements sont sapés par la com’. Elles doivent rechercher les voies d’une communication politique authentique grâce à l’empathie entretenue avec les gens.
Gouvernants et élus ont à prendre conscience de ce que les demandes économiques, sociales, culturelles de la société civile passent par les attentes d’autres modes de communication.
Vol d’une victoire électorale en bande organisée…
… avec la complicité involontaire du Conseil Constitutionnel !
Oui, c’est ainsi qu’on pourrait présenter mon récit-témoignage, que la livraison de juin-juillet de la Revue Le Courrier du Parlement publie, intitulé par le Rédacteur en chef, Jean-François Bège : «Pourquoi faut-il signer quand on vote ?».
J’ai souhaité raconter, dans le style d’une nouvelle, ce qui s’est passé en juin 1988 dans la 11ème circonscription législative du Val-de-Marne. [ Voir « Articles » sur ce site ]
Il y a prescription… J’ai été encouragé – par des historiens, des politistes et des amis militants civiques – à raconter le déroulement d’une fraude électorale, d’une nature et d’une ampleur aujourd’hui fort heureusement remisées au magasin des mauvais souvenirs de notre démocratie.
Replacé dans le contexte de mes engagements personnels, ce récit prend le lecteur par la main pour lui faire visiter les mécanismes d’un trucage… Une «grave défaillance de notre démocratie», selon Alain Decaux qui, à l’époque, m’avait dit se féliciter de voir «attirée la curiosité des médias».
J’adresse un clin d’œil à Guy Carcassonne, car j’ai voulu rappeler la place que cet ami regretté a tenue pour moi dans cette affaire. Notamment, notre commun regret que la jurisprudence du Conseil Constitutionnel exige que le résultat d’une instruction approfondie soit produit dans un délai de recours forcément très court. Avec le risque de parfois inverser le sens d’un scrutin !
Les dispositions nouvelles du Code électoral, largement prises après cette consultation faussée du 5 juin 1988, semblaient, dès l’année suivante, entièrement passées dans les mœurs. Belle aptitude à vite refouler une lacune de la procédure électorale.
Je peux ainsi faire état d’une certaine satisfaction, ce 19 mars 1989, en sortant de la Mairie de Cachan après avoir accompli mon devoir civique pour les élections municipales : « Oui, désormais, lorsqu’ils votent, les électeurs émargent ! ».
Au fil des ans…
Depuis 5 ans, vous êtes bienvenus sur le site www.pierrezemor.fr. Peut-être y avez-vous trouvé des éléments utiles d’information ou de réflexion. Mais, j’ai eu le sentiment qu’il fallait en dire un peu plus.
N’est-il pas banal de désirer enrichir sa « trace » au fil des années ? De vouloir placer dans une mémoire virtuelle des bribes supplémentaires d’expériences, de donner des éclaircissements et de mieux faire valoir ses points de vue.
Aussi trouvera-t-on, dès la page d’accueil, la possibilité de consulter des « mémoires égrenées », sur 77 pages – exactement une page en moyenne par an – avec des liens vers des articles ou des ouvrages.
Donc des échos d’évènements personnels, agrémentés d’images de voyages.
Des échos surtout des temps professionnels, sur le versant management, prospective, stratégie, image et identité,… de mon activité de consultant ou d’enseignant à HEC et en autres lieux.
Puis de mon triple métier (contentieux, avis au gouvernement, études et rapports) de 18 années au Conseil d’État.
Des échos aussi de mes profonds engagements, depuis la fin des années 60, auprès de Michel Rocard.
Des temps associatifs, en particulier grâce à « Communication publique », pour diffuser les meilleurs savoir-faire d’une relation authentique et pérenne entre les institutions et les citoyens
Avec les mêmes objectifs, des temps de militance d’élu local et régional ou de président de Commissions (CNC, CNDP, CNAarusp) pour la participation des citoyens, notamment via la concertation et le débat public.
Tout cela est encore gros de publications à venir…
Il est un âge où l’énergie du chemin restant à parcourir s’alimente au récit du chemin parcouru.
La contestation de la concertation ?
Les avancées de la communication des institutions publiques ont permis, dans une assez bonne mesure, de répondre aux attentes immédiates et à quelques exigences de citoyens qui avaient été trop longtemps ignorés des décideurs et des acteurs de la chose publique.
Les savoir-faire de mise à disposition de l’information, d’explication, de simplification et de numérisation des procédures, de dialogue dans les services, de consultation des publics intéressés ou de concertation ont contribuer à substituer, à la communication-promotion octroyée à des usagers-clients, une communication-relation entretenue avec des citoyens, en lente convalescence des maux de la passivité.
Mais hélas, des régressions se manifestent déjà. Les accès se font intempestifs vers des informations foisonnantes et vite frappées de péremption. Les proximités interpersonnelles autres que virtuelles s’éloignent. L’opacité des processus de décision persiste. Dialoguer se fait dans la souffrance, face aux crises identitaires des valeurs de l’intérêt général, dans l’effacement du moyen ou du long terme.
Dès lors, dans le silence de l’abstention ou avec une indifférence de façade ou aussi par absence de pédagogie participative, montent les colères frustrées des citoyens. Ils se sentent mal associés à des décisions essentielles pour leur vie quotidienne, comme pour l’avenir de leurs enfants.
Le comble est de voir remis en question, par les balbutiements de la décision publique, les efforts louables accomplis d’étendre la communication publique jusqu’à la concertation et au débat public. Les exemples se multiplient, à Notre-Dame des Landes et ailleurs, d’une incapacité à savoir, au moment pertinent, solliciter la société civile dans la conduite des projets, notamment d’aménagement.
Notre histoire institutionnelle d’une information transcendante, descendante – voire condescendante – suscite plus la protestation et la contestation, qu’elle n’encourage une culture du débat public.
Il est urgent que les acteurs publics, surtout les responsables politiques, et en premier lieu les parlementaires, adoptent des démarches et des pratiques participatives pour revigorer la démocratie représentative.
Urgent, car la com’ – réductrice de la complexité de l’action publique – et la propagande – utile aux mauvaises causes ou au terrorisme – se portent mieux que jamais.
Jean-Louis Crémieux–Brilhac
J’ai fait sa connaissance, en même temps que celle de Stéphane Hessel, en 1955 en fréquentant des réunions de jeunes mendésistes. Jean-Louis Crémieux-Brilhac était auprès de PMF comme un animateur de son cabinet et le facilitateur d’une communication qui n’usait d’aucun des artifices actuels de la com’. La clarté de son analyse discrète des acteurs et des situations politiques était précieuse pour conforter la volonté de Mendès de toujours « dire la vérité ».
Invité par Communication publique à participer à plusieurs de nos rencontres, Jean-Louis Crémieux-Brilhac n’a pas manqué de nous rappeler la place de la pédagogie. Le 16 juin 2004, au Conseil d’État, où il était chez lui, avec Stéphane Hessel, Léone Nora et bien d’autres, nous avons rendu hommage à l’arrivée, 50 ans plus tôt, de Pierre Mendès France à la Présidence du Conseil. Ce fut un beau moment pour évoquer la force d’une communication gouvernementale authentique*.
Mettre les données publiques sur la table, comme assurer la transparence du fonctionnement des institutions, préparaient Jean-Louis Crémieux-Brilhac à être concepteur et co-fondateur de La Documentation française. Il pensait la communication intimement mêlée à l’action. En avril 2014, dans la revue Parole Publique (n°5), les souvenirs de cet ancien résistant lui font dire que «communiquer c’est agir», tout comme Edgar Morin affirme, avec un parcours assez semblable, que «communiquer c’est résister».
On voudrait que les très bonnes choses n’aient pas de fin. Hélas, avec Jean-Louis Crémieux-Brilhac disparait l’un de ces grands témoins, acteur et historien, d’une communication nourrie par la culture.
*voir sur le site, à « Articles » : Pierre Mendès France et la communication gouvernementale – Hommage du 16 juin 2004 par PZ en supplément de la Lettre de Communication publique n°81.
Espoirs de communication dans un décor vacillant
Les crises économiques et sociales, le terrorisme, les menaces sur l’environnement sollicitent brutalement la classe politique.
On réclame des solutions immédiates.
Pour des évolutions qui ne peuvent s’opérer qu’à moyen terme.
Pour des changements de comportements sur le long terme.
On voudrait des pouvoirs de » vrai chef « .
Alors que la complexité de l’art de gouverner requiert moins que jamais de sacrifier à cette nostalgie monarchique autoritaire.
Car la société attend plutôt des guides et des explications. Elle aspire à discuter…
…avant de sombrer dans la passivité, l’indifférence ou la colère.
La communication politique ne profite pas des progrès réalisés par la communication institutionnelle publique. Fondée sur la mise à disposition de l’information d’intérêt général et ouverte au dialogue, celle-ci s’est développée en échappant aux registres de la com’ (propagande promotionnelle de produits à consommer, images occultant les contenus,… délivrance univoque de l’information simplifiée des médias).
Au contraire, paraissent s’essouffler les vertueux mouvements enregistrés à partir des années 80 – depuis seulement un tiers de siècle – pour sortir de la dizaine de siècles de parole publique sacrée, régalienne, centrale et top down.
Le dialogue social se languit.
La consultation redevient un exercice sommaire obligé.
On évoque l’usage du référendum sans réel débat public préalable. Comme un sondage ou le test de rapports de forces.
Surtout, les acquis de la concertation se perdent dans les méandres des processus de décision. La participation citoyenne reste souvent au stade des bonnes intentions.
Alors, comment reprendre espoir ?
Grâce aux démarches bottom up ?
Aux initiatives de ces collectifs férus d’économie de proximité, de consommation dite collaborative et proche de la production, de troc, d’échange, de circuits courts et de réduction d’inutiles intermédiaires, de partage d’actions, d’instruments, de locaux, de mutualisation des moyens et des objectifs.
Genèse d’une communication, de proximité naturelle, fortement numérique, hors médias traditionnels1.
Elle est susceptible de faire peu à peu entendre, dans le chaos organisé de la globalisation des échanges mondiaux, l’attention aux solidarités, à l’écologie, au traitement des ressources rares.
À coup sûr, une communication porteuse d’intérêts généraux !
1Une 3ème communication affirme ainsi sa spécificité au regard des finalités. Voir, dans « Articles » sur le site www.pierrezemor.fr la note (mai 2010) de Présentation du Cercle des 5 Communications.
Ni Marine Le Pen, ni Sarkozy
Qui nous a conduits à envisager un tel mot d’ordre pour 2017 ?
Un ancien président de la République qui met artificiellement sur les deux plateaux de la balance électorale deux Fronts.
L’un bien réel et menaçant pour des valeurs de la démocratie et pour des principes fondamentaux du vivre ensemble.
L’autre, illusoire, dépassé, mais propre seulement à apporter l’eau de l’UMPS au moulin du FN.
Les électeurs républicains et démocrates n’oublieront pas !
Pour ma part, je me souviens d’un Michel Rocard, alors ministre de l’Agriculture, appelant, dans un discours à Chatenay-Malabry, à la veille d’une élection législative, le 7 mars 1985, à « ne pas aller à la pêche et à voter pour la droite républicaine », plutôt que pour le FN… Un Michel Rocard désavouant ensuite les risques pris à ce sujet par les projets électoraux du gouvernement, au point d’en démissionner le 4 avril !
Il reste deux bonnes années pour éviter le cauchemar d’un scénario de second tour de la prochaine élection présidentielle où, d’une part, la gauche ne se serait pas ressaisie pour que son candidat ne soit pas éliminé au premier tour et où, d’autre part, la droite n’aurait pas su désigner un candidat autre que Sarkozy.
Nicolas Sarkozy, après ce mauvais coup porté à la République – et même si à son habitude il tente de brouiller son message – vient de gonfler les rangs, bien sûr à gauche, mais aussi à droite, de ceux qui ne voteront plus jamais pour lui.
Que répond la communication politique à la barbarie ?
Entre les 7 et 11 janvier, depuis les trois attentats d’islamistes terroristes, qui ont fait 17 morts à Charlie Hebdo, à Montrouge et dans un supermarché cacher, jusqu’à la manifestation de près de 4 millions de personnes en France, s’est déployée une vaste émotion populaire, confortée par la venue à Paris de 44 chefs d’États ou de gouvernements solidaires en indignation, protestation et en appel à la vigilance.
À part deux ou trois dérapages de com’ politicienne, égocentrés comme à l’habitude, les propos et les attitudes, notamment de la part de l’exécutif, ont eu l’authenticité de partager l’émotion.
Durant ces quelques journées, la communication politique a montré la force immédiate de la dignité. Et l’importance de la qualité de la relation avec la société civile pour tenter de se mieux comprendre.
La juste et ferme parole du Premier ministre a d’ailleurs trouvé l’écho unanime de l’Assemblée nationale.
Manuel Valls a pu surtout dire, au-delà du traitement des inquiétudes et des impatiences par l’annonce de quelques mesures immédiates, l’impérieuse nécessité de multiplier les dialogues pour faire les bonnes analyses et surmonter les obstacles du vivre ensemble… forcément dans le moyen et long terme.
Car s’il faut rallier les opinions à des valeurs communes, telle la laïcité, la communication politique doit savoir obtenir du temps.
Le temps donné aux lents changements des comportements. Aux très lentes évolutions des mentalités. Le temps des pédagogies approfondies et des discussions sereines !
Face aux peurs qu’exploite les com’ politico-médiatiques de la facilité, comment la communication politique va-t-elle savoir prendre le temps de calmer les craintes et de taire les rodomontades pour faire évoluer les idées reçues et les réflexes stéréotypés, dans la guerre d’un nouveau genre qui menace la planète ?
La classe politique et les médias professionnels sont-ils prêts à relever ce défi de civilisation, de faire une bonne place au temps, c’est-à-dire à l’autre.
Un bon cru 2015 ?
Ah ! Oui, les vœux…
D’abord, en vert, c’est mieux : une couleur qui porte, dit-on, l’espoir.
Même l’utopie. C’est entendu, du vert.
Ensuite, sur le fond, que dire, qui donne un peu de rose aux joues ?
On essaie. C’est un peu terne.
Et le contenu ?
À l’envi, bilans et perspectives tiennent la rubrique.
Quelles analyses privilégier ? Les pessimistes ? Les optimistes ?
Question déplacée : voyons, le combat est inégal !
Hormis chez quelques adeptes d’une pédagogie par la politique du pire,
on ne voit pas comment formuler des souhaits masochistes.
Il ne reste que le registre classique :
La meilleure année possible,
qui réponde à vos attentes,
pour vous, pour vos proches,
pour vos activités, projets et engagements.
Sans oublier de terminer avec les meilleures salutations et un bouquet de dragées.
Si Internet a le toupet de déformer cette image, pour en savoir plus, cliquez sur les vœux de