Communication institutionnelle publique ? Communication politique ?
Nouveaux médias et réseaux foisonnants élargissent considérablement l’espace public. Toute communication est maintenant publique. Et, pour éviter de voir la technocratie prendre le pas sur la démocratie, ne doit-on pas tout autant dire que toute communication publique est politique ? Vaines batailles sémantiques qui se sont apaisées avec l’introduction de l’adjectif institutionnel !
Se définissent plus sereinement deux domaines essentiels à la vie de la cité : la communication institutionnelle publique et la communication politique. Deux domaines qu’il faut distinguer. Les règles qui les régissent diffèrent. Mais, leurs frontières sont assez perméables. Le mélange des genres menace. Une différenciation s’impose, qui est d’ailleurs plutôt protectrice des acquis de la communication institutionnelle publique. Quatre critères à mettre en avant.
D’abord, qui communique ?
D’un coté, le monde politique avec les élus, les candidats, les détenteurs de pouvoirs délibératifs, législatifs, exécutifs et les animateurs des partis, qui selon la Constitution concourent à l’expression du suffrage. Il faut ajouter des experts, des politologues, les observateurs et les médias.
De l’autre coté, l’administration sous ses diverses formes, les fonctionnaires, les dirigeants et les agents des institutions et services publics.
Sur quoi communiquer ?
Accompagner le fonctionnement de l’État de droit, défini par les lois, sous le regard de l’autorité de justice, exige de mettre l’information à la disposition de la société, d’expliquer les procédures par le dialogue, voire la concertation… On tangente ici le domaine du politique dont le mandat est forcément imprécis.
Au politique revient de faire évoluer l’État de droit. Lui incombe l’insigne difficulté de modifier les règles en opérant des changements dont l’urgence est mal appréciée. C’est un défi pour une communication politique qui se borne à recourir aux savoir-faire d’un néo-marketing pour la conquête électorale des pouvoirs. L’électeur est traité en consommateur, mal préparé à l’inattendu et déçu de ne pas être associé à l’exercice du pouvoir.
Comme y a invité la loi du 15 janvier 1990, en séparant financement politique et financement institutionnel, on devrait plus s’inspirer des efforts accomplis par la communication publique vers une relation pérenne avec le public. La confiance est la condition pour que passent les messages et qu’on puisse gouverner avec l’opinion.
Quel horizon vise la parole publique ?
La durée est la marque de l’institutionnel. Elle confère une certaine sérénité aux services publics de la communication. Le temps permet de prendre l’autre en considération, d‘établir une relation qui traite le citoyen mieux qu’un client.
Le temps de la communication politique est hélas court. On ne peut répondre dans l’instant au questionnement brutal d’une actualité. On ne peut instruire une réponse rationnelle et durable qu’en remettant à leurs justes places les émotions et la passion.
Avec quels regards des médias ?
Les journalistes, surtout dans les médias audiovisuels, sont peu portés à donner du temps long aux institutions. Ils considèrent que dire l’État de droit n’entre pas dans leur devoir d’informer. Ils ne jurent qu’actualité. Le règne de l’immédiateté réduit la valeur ajoutée par les professionnels de l’information. Pourtant essentiel, leur rôle de contre-pouvoir s’est transformé en un pouvoir d’imposer à la communication politique le rythme du temps court. Messages réducteurs, manque de contexte et absence de mémoire nourrissent les fantasmes de l’action politique aux effets instantanés.
Des frontières poreuses entre domaines : la contagion d’une com’ politique au rabais menacerait-elle la communication institutionnelle publique ?
Le thème de ce « Billet » est retenu pour la rencontre de Communication publique, le 26.09 à l’ENA.